RIchard III
Mis en scène par Laurent Fréchuret/ Comédien principal: Dominique Pinon
Théâtre de Vidy: du 4 au 14 mars 2014
Dernier descendant de la Maison d’York, Richard III (Dominique Pinon sur scène) fut, paraît-il, un tyran sanguinaire qui ne redouta ni le fratricide ni l’infanticide pour mettre la main sur la couronne d’Angleterre. Haï et craint de tous, il mourut lors de la bataille de Bosworth, battu par celui qui devint Henri VII d’Angleterre. C’est cette délirante histoire que conte le metteur en scène Laurent Fréchuret sur les planches du Théâtre de Vidy : « Nous assistons à la métamorphose d’une réunion de famille en un champ de cadavres […] un poème dangereux, un nœud de vipères à dénouer avec la langue. » Un nœud de vipères, tant les cabales entre les personnages sont chose courante. Un poème dangereux aussi, car le lyrisme de Shakespeare tend à nous faire oublier le drame qui se joue devant nous. A ce titre, les talents d’acteur de Dominique Pinon rendent le personnage machiavélique de Richard III presque attachant. Le boiteux ment, l’on lui pardonne. Lorsqu’il tue, le spectateur est tenté par l’empathie. C’est d’ailleurs ce que lui a reproché un journaliste du journal
Le Temps dans la critique de cette pièce : « Dominique Pinon, l’amoureux malheureux du Fabuleux Destin d’Amélie Poulain, ne déploie ni la cruauté, ni la trouble séduction de Richard III – ni quoi que ce soit d’autre de stimulant. » Avant de conclure : « C'est une déception. »
Un exemple parmi tant d’autres qui nous rappelle nos sensibilités multiples face à une pièce de théâtre. Dans Richard III, Dominique Pinon s’est approprié ce personnage et l’a dramatisé à sa manière. L’on y retrouve un peu de l’acteur d’
Amélie Poulain ou de
Delicatessen. Manque d’authenticité ? Sûrement pas. La marque d’un grand comédien assurément. Pinon est accompagné sur scène par des comédiens au charisme indéniable : Nine de Montal (la reine) parfaite dans son rôle austère, Pauline Huruguen (femme de Richard) sublime et touchante, Jean-Claude Bolle-Reddat drôle et précis, Pierre Hiessler changeant aisément d’habit ou encore Martine Schambacher captivante par son jeu et sa force comique. Leurs compagnons de la compagnie Le Théâtre de l’Incendie méritent eux aussi l’éloge. Trois heures et vingt minutes d’un bonheur cruel.